C’est avec une immense tristesse que nous apprenons le décès du Professeur André Mortreux survenu durant le weekend dernier.

André Mortreux est né à Libercourt dans le nord en 1943. Il a suivi l’ensemble de son cursus Universitaire à l’Université de Lille où il a obtenu le DEA de Chimie Organique Physique en 1967. Il a eu l’opportunité d’être assistant en 1968 puis maître assistant en 1975 à l’IUT de Poitier. Cette période Poitevine a été mise à profit pour réaliser une thèse de doctorat sous la direction du Pr. Blanchard qui a porté sur des « Réactions Catalytiques d’Hydrocarbures Acétyléniques : Isomérisation et Métathèse ». Cette période a notamment amené André Mortreux à développer des thématiques de catalyse hétérogène puis de catalyse homogène.  Le doctorat aura comme point d’orgue, la mise en évidence du premier catalyseur de métathèse des alcynes (Mo(CO)6 / Phénol) en phase homogène. Sa connaissance de la catalyse de coordination et de la catalyse en phase homogène sera en particulier renforcée au travers d’un post-doctorat effectué en 1976 dans le laboratoire du Pr. F.G.A. Stone à Bristol. En 1977, André Mortreux rejoindra ensuite l’IUT de chimie de Lille à Villeneuve D’Ascq en tant que maître assistant avant d’être promu professeur des universités en 1983. Son arrivée à Lille permettra de renforcer la thématique de catalyse homogène initiée par, puis co-dirigée avec le Pr. Francis Petit dès 1976. Une politique de recherche volontariste soutenue par l’Université de Lille, le CNRS ainsi que d’importantes collaborations avec plusieurs partenaires académiques ainsi que de nombreuses entreprises françaises (CDF chimie/Orkem/Elf Atochem, Enichem, Rhône Poulenc, SNPE, Sollac, Sipsy, Béghin-Say, Sanofi, Roquette Frères) permettront des avancées déterminantes dans des domaines diversifiés de la catalyse homogène. La métathèse des alcynes est un élément précurseur qui amènera l’équipe, au travers du LCOA (Laboratoire de Chimie Organique Appliquée), du laboratoire de Catalyse de Lille, de l’Unité de Catalyse et Chimie du Solide (depuis 2006), à développer des thématiques de recherche souvent précurseures. On citera des travaux importants liés à la synthèse électrochimique de catalyseurs, la valorisation du monoxyde de carbone, la chimie des diènes (télomérisation / dimérisation), le design de ligands chiraux (Les AMPP) et leurs applications en catalyse asymétrique (allylation, hydrogénation, hydroformylation, dimérisation), la catalyse de polymérisation et la chimie du végétal. Dans le domaine de la polymérisation en particulier, il a développé de nombreux catalyseurs originaux à base de complexes organométalliques et de coordination, en particulier à base de terres rares pour la (co-) polymérisation stéréosélective des diènes et des oléfines. Il fait partie des pionniers dans le domaine de la polymérisation par transfert de chaîne (CCTP et CCG), en particulier avec le premier système binaire associant un complexe de terre rare à un alkyle de magnésium pour la polymérisation vivante et contrôlée de l’éthylène. Ces travaux ont par la suite permis la synthèse de copolymères multiblocs inédits du styrène et de l’isoprène par polymérisation par navette (chain shuttling polymerization). Plus récemment, il a imaginé et développé un système « kicker » inédit permettant l’auto-amorçage via une catalyse rédox originale de la polymérisation du chlorure de vinyle par voie radicalaire, en partenariat avec la société Vynova située à Mazingarbe dans le bassin minier, illustration de sa volonté forte de contribuer à l’essor industriel de sa Région.

Tout secteur de synthèse tirant profit de l’utilisation de métaux de transition a représenté un centre d’attractivité pour André Mortreux qui a concrétisé de nombreux projets de recherche aussi bien académiques qu’industriels durant sa carrière. L’ensemble de son travail conduira à plus de deux cents publications scientifiques ainsi que 34 brevets d’invention. Le Professeur André Mortreux sera membre IUF sénior en 2001 puis 2011 et prendra une part active dans la vie de la SCF (SFC) au niveau régional (secrétaire de la section nord de 1987 à 1998) puis vice-président de la division Catalyse en 1998. Il a obtenu le Prix Pierre Süe de la SCF en 2017.

Chacun se souviendra de sa pugnacité sans faille encouragée par ses convictions, de sa curiosité scientifique toujours rafraichissante ainsi que de son désir de mettre en avant une discipline régionale forte que représente la catalyse.